Nous avons eu le bonheur de prendre en main une XK120 DHC de 1953 et une E-Type OTS de 1961. Le terme n’existait pas encore, mais, pour nous, ce sont des Supercars de l’époque.
Les modèles des années 50 et 60 gardent la cote. De ce fait, rouler en Jaguar ancienne n’est pas à la portée de tous. Pour notre part, il est inutile de vouloir comparer ces modèles d’époque avec les véhicules actuels. En revanche, la conception, le moteur et les qualités dynamiques ont fait la différence avec la concurrence tant de la XK120 DHC que de la E-Type OTS. Ces deux modèles ont une décennie d’écart, ce qui laisse entrevoir une réelle évolution. Voyons ensemble quels sont leurs points forts et leurs défauts.
XK120 DHC 3.4-Litre | La première des XK au succès immédiat
Le pare-choc avant est en deux parties une des caractéristiques de la version XK120 DHC.
De la genèse à la route pour la XK120 DHC
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les constructeurs ne pouvaient proposer que leurs modèles d’avant-guerre à une clientèle demandeuse. Jaguar avait déjà démarré le développement du moteur de la future XK avant les hostilités, en améliorant celui de la SS. Nouvelle culasse à double arbre à cames en tête. Bien évidemment, un moteur ne suffit pas. Il faut lui adjoindre un châssis et une carrosserie qui en feront une voiture. C’est ainsi que le fondateur de la marque, William Lyons, décida de construire une voiture de sport qui utiliserait ce moteur et aurait pour nom XK120 Super Sport. Une carrosserie sous forme de roadster fut donc dessinée pour le châssis de la MK V raccourci.
Présentée au London Motor Show de 1948, la voiture provoqua un coup de foudre général. Et pour cause, une ligne élégante, un moteur performant, du cuir Connolly, une instrumentation complète et un prix particulièrement attractif achevèrent de convaincre. Face au carnet de commande bien rempli, la firme se trouva dépourvue devant les 200 exemplaires qu’elle pensait seulement produire. Qu’à cela ne tienne. La carrosserie en aluminium sur ossature bois fut rapidement remplacée par des panneaux en acier pressé sur une ossature métallique. De ce fait, les premières versions en aluminium sont les plus recherchées (environ 240 exemplaires). Il aura fallu attendre une année pour que les outils de production soient totalement opérationnels. Les États-Unis absorbèrent la majorité des commandes de ce nouveau roadster Jaguar XK120 DHC.
Au volant de la Jaguar XK120 DHC 3.4-Litre
Les rétroviseurs sur la DHC sont placés en bout d’ailes avant ce qui nécesite une aide extérieure pour les régler.
Aspect général
La voiture mise à notre disposition se présente dans une robe crème assortie à un intérieur en cuir rouge. Il s’agit d’une Jaguar XK120 DHC SE – Drophead Coupe Special Equipment. Le véhicule dispose d’un tableau de bord en loupe de noyer, des roues fils et un double échappement pour la partie visible. Le moteur a des cames modifiées ainsi qu’un volant moteur allégé. Pour mémoire, la XK120 se décline en trois versions : OTS – Open Two Seater ou Roadster, DHC – Drophead Coupe ou Cabriolet, et FHC – Fixed Head Coupe ou Coupé. Le seul moteur disponible est le 3.4-Litre (3442 cm³), deux carburateurs SU H6, accolé à une boîte Moss à quatre rapports, plus marche arrière. La première n’est pas synchronisée.
Le tableau de bord
La porte conducteur s’ouvre très largement – voir photo – pour permettre de se glisser à l’intérieur de ce cabriolet. Le grand volant n’est pas étranger à la difficulté de prendre place derrière. Face au pilote, le compte-tour, puis trois petits manomètres – huile et eau, ensemble – essence et batterie – et enfin à droite, devant le passager, le compteur de vitesse. La voiture a été construite avec le volant à droite. Pour une conduite à gauche, le tableau de bord ne change pas.
Sur la route
Le six cylindres démarre facilement. À l’arrêt, la direction est lourde. Première, seconde, la synchronisation est lente, mais après quelque temps de conduite, nous finissons par nous y habituer. La direction est une Burman à recirculation de billes. Sur la route, la direction reste imprécise. Et, pour le freinage, il vaut mieux anticiper, car les quatre freins à tambours manquent cruellement d’efficacité. Toutefois, l’automobile reste un roadster performant et assez agréable à conduire en comparaison de la concurrence de l’époque.
L’ouverture des portes sur la DHC est supérieure à 90° toutefois cela nécessite de la place pour les ouvrir.
XK120 DHC | Les points forts et les points faibles
Les deux sièges basculent vers l’avant permettant d’accéder normalement aux places arrière sur la DHC.
Les points forts
Commençons par les aspects positifs. La Jaguar XK120 DHC est une auto plutôt amusante à conduire. Son dessin est chic et reconnaissable immédiatement. Ses performances sont au-dessus de la moyenne (en comparaison de la concurrence). Les pièces détachées sont disponibles et la maintenance est facile. De plus, il est possible d’améliorer votre XK120 avec des accessoires modernes.
Les points faibles
Quelques points à surveiller tout de même. Il s’agit, avant tout, de la corrosion qui est galopante. En conséquence, le coût de restauration peut atteindre des sommes importantes. Ensuite, le chauffage et la ventilation ne sont pas dignes d’un tel roadster. Enfin, la place intérieure est mesurée.
Acheter une Jaguar XK120 DHC ou non ?
Prévoir un budget important
Pour rappel, la Jaguar XK120 est celle des puristes. Par conséquent, le vendeur en voudra pour son argent. De ce fait, le budget à prévoir reste conséquent. Si le véhicule est l’un des 240 exemplaires à posséder une carrosserie en aluminium, alors là, le prix s’envole. Sur le site autoscout.ch, le prix des Jaguar XK120 varie entre CHF 90 000 et 150 000. Une pièce unique carrossée par Beutler s’affiche à CHF 298 000. Il est intéressant également de parcourir les sites de ventes aux enchères et, pourquoi pas, de franchir les portes d’une salle des ventes. Au prix d’achat, il faudra aussi ajouter les coûts de l’entretien, quelques fois non négligeables. Soyez donc attentif à l’état général du véhicule.
Éviter les mauvaises surprises
Avant un achat conséquent, il est bon de se laisser le temps de la réflexion. S’offrir une Jaguar XK120 DHC représente du plaisir, mais peut aussi engendrer des déconvenues. Voici quelques questions, parmi d’autres, qui pourraient vous éviter les mauvaises surprises :
– À quel endroit se trouve la voiture convoitée ? Vous devez absolument pouvoir aller la voir.
– Le vendeur est-il un garage ou un particulier ?
– Pour quelle raison la voiture est-elle mise en vente ?
– Le volant est-il à gauche ou à droite ?
– A-t-elle été modifiée ou se trouve-t-elle dans sa configuration originale ?
– Les numéros châssis / moteur / boîte sont-ils concordants ?
– La culasse a-t-elle été modifiée au sans plomb ?
– Etc.
Le choix vous appartient
Qu’en pensez-vous ? Est-ce un oui ? Acceptez-vous de prendre pour compagne une Jaguar XK120 pour le meilleur et le pour le pire ? Sinon, il y a le plan B. Les Jaguar XK140 et 150 présentent des qualités supérieures à la XK120. Surtout en termes de confort, et aussi de moteur, avec le 3781cc. Cependant, la XK120 représente la quintessence. C’est par elle que cette fabuleuse aventure a commencé. Pour information, la XK120 DHC de notre essai nous a été confiée par l’Oldtimer Galerie à Toffen. En suivant ce lien, vous aurez à disposition toutes les données du véhicule.
La version SE de la XK120 DHC se reconnaît à son tableau de borden loupe son double échappement et ses roues fils ainsi qu’une capote plus isolante.
E-Type OTS 3.8-Litre | La plus belle voiture du monde selon Enzo Ferrari
Après la XK120 en 1948 William Lyons récidive en 1961 avec la Jaguar E-Type OTS et FHC.
Salon de Genève 1961 | La Jaguar E-Type éclipse les autres prétendantes
Sur le série 1 de la Jaguar E-Type OTS le tableau de bord est en aluminium bouchonné.
C’est la veille de l’ouverture du salon automobile de Genève, le 15 mars 1961, que la Jaguar E-Type apparaît pour la première fois au restaurant du Parc des Eaux-Vives. Il s’agit d’un coupé de couleur Gunmetal. La voiture reprend le moteur de la XK150, le 3781cc, à double arbre à cames en tête, alimenté par trois carburateurs SU. Sur le premier modèle, la console est en aluminium bouchonné, remplacé dès 1964 par un vinyle noir. Les versions produites de mars 1961 à janvier 1962 sont dites Flat Floor ou plancher plat. Ce sont les plus recherchées, malgré l’espace restreint pour les jambes. La boîte à quatre rapports est une Moss à première non synchronisée.
Au volant de la Jaguar E-Type OTS Flat Floor 3.8-Litre
Aspect général
Le cabriolet E-Type OTS – OTS pour Open Two Seater – mis à notre disposition se présente dans une robe rouge – Carmen Red – assorti d’un cuir et d’une capote noirs. Les sièges, type baquet, sont d’un bon maintien, mais le dossier n’est pas réglable. Le volant bois à la jante mince permet de lire aisément les deux gros cadrans compte-tours et compteur de vitesses. L’immense capot, surmonté de sa bosse caractéristique, s’ouvre en basculant vers l’avant. Le 6 cylindres de 3.8-Litre surmonté de ses trois SU en impose.
Les commandes de bord
Le court levier de vitesse tombe bien sous la main. Sur ce modèle, la première n’est pas synchronisée. Le passage de seconde en première se fait via un double débrayage. Le pare-brise incurvé comporte trois petits essuie-glaces. La console centrale regroupe les différents manomètres ainsi qu’une batterie d’interrupteurs à bascule. Les rétroviseurs extérieurs – forme obus – doivent être réglés via une aide avant de partir. Après, c’est trop tard.
Dans la circulation
En mode décapoté, la visibilité est bonne partout. Malgré un âge respectable, la Jaguar E-Type OTS s’insère facilement dans la circulation de 2022. Le confort est relativement correct. Sans doute grâce à son système de suspension arrière à quatre amortisseurs télescopiques, dont les ressorts sont intégrés. Le moteur de 3.8-Litre est bien vivant. Il accepte de monter rapidement dans les tours. La boîte est un peu lente. Avec l’habitude, la E-Type atteint des vitesses inavouables sur les petites routes. Le freinage est confié à quatre disques. Les freins arrière sont, quant à eux, montés inboard contre le différentiel.
Tenue de route
La tenue de route de notre E-Type OTS d’essai est saine. Pas de mauvaise surprise. Bien que non assistée, la direction est souple et permet d’enchaîner les virages rapidement. Seul bémol : que faire de sa jambe gauche pour laquelle il n’y a pas de repose-pied. À la longue, cela peut devenir fatiguant. Si vous partez en week-end, voire en vacances, vous allez être contraint de faire des sacrifices. Sur le roadster, le coffre est ridiculement petit. Donc, si vous avez beaucoup de bagages, orientez-vous vers le coupé qui offre un volume intéressant.
Jaguar E-Type Series I | Les points forts et les points faibles
Une icône de l’automobile mondiale dont la valeur est toujours très soutenue que cette E-Type OTS series I.
Les points forts
Si vous souhaitez vous rendre acquéreur – quelle que soit la version ou la cylindrée – prenez votre temps et passez en revue tous les détails de la voiture. Notre liste élaborée pour la XK120 peut être reprise sans problème. Toutefois, faites attention à la concordance des numéros châssis / moteur / boîte. Le vendeur doit vous présenter tous les documents liés à une modification de la voiture. La Jaguar E-Type est une voiture-plaisir. Sa ligne, la vue depuis son volant, les accélérations sont un régal pour tout amateur de voitures de sport. L’ambiance d’une E-Type ne se retrouve sur aucune de ses concurrentes de l’époque. William Lyons avait frappé fort en 1948 avec la XK, il enfonce définitivement le clou avec la E-Type. Vous trouverez facilement les pièces détachées ainsi que des spécialistes pour l’entretien.
Les points faibles
Parlons de l’entretien. La E-Type est une voiture compliquée. Les coûts de maintenance peuvent devenir importants. Parmi les aspects contraignants, nous pouvons citer la consommation d’essence, le coût de restauration, le prix de certaines pièces spécifiques et la fiabilité électrique.
Acheter une Jaguar E-Type Series I ou non ?
Prévoir un budget important
Avant toute chose, sachez que la Jaguar E-Type est une voiture chère. Les Series I sont particulièrement recherchées par les passionnés. Mais attention à ne pas vous jeter dans la gueule du loup ! La restauration d’une E-Type est très onéreuse. En revanche, de nombreuses Jaguar E-Type sont parties aux USA. Il y a, en fait, plus de E-Type OTS 3.8-Litre avec conduite à gauche – 6885 – qu’à droite – 942. Cela vaut quelles que soient les versions et les années. Sur le site autoscout.ch, comptez entre CHF 135 000 et 200 000 pour une 3.8-Litre Series I.
Éviter les mauvaises surprises
Si vous souhaitez vous rendre acquéreur – quelles que soient la version ou la cylindrée – prenez votre temps et passez en revue tous les détails de la voiture. Notre liste élaborée pour la XK120 peut être reprise sans problème. Toutefois, faites attention à la concordance des numéros châssis / moteur / boîte. Le vendeur doit vous présenter tous les documents liés à une modification de la voiture. Il arrive, en effet, que certains propriétaires déposent la boîte Moss et la remplacent par une boîte entièrement synchronisée. Logiquement, l’ancienne boîte devrait vous être livrée avec l’auto. La Jaguar E-Type rencontre des problèmes de corrosion dans sa partie structurelle. À surveiller.
Le choix vous appartient
La balle est dans votre camp. Allez-vous ouvrir votre porte-monnaie pour vous rendre acquéreur d’une première version ? Bien sûr, il existe la version 4.2-Litre, toujours en 6 cylindres, ou alors celle en 5.3-Litre, mais avec un V12. Les puristes vous orienteront vers la Series I. D’autres vous conseilleront la Series II et son 4.2-Litre plus confortable. Mais, pour le vrai plaisir et dans la même veine que la XK120, la E-Type 3.8-Litre est la plus belle, la plus racée et une incroyable sportive. Tout comme la XK120 DHC, cette E-Type OTS 3.8-Litre est au catalogue de l’Oldtimer Galerie de Toffen. En suivant ce lien, vous aurez à disposition toutes les données du véhicule.
Pour l’entretien des cuirs de votre Jaguar E-Type OTS Maison Eugène propose savon et crème adaptés.
Vintage Car Magazine vous donne son avis
Après avoir pris en main la XK120 DHC et la E-Type OTS, ces deux icônes de l’industrie automobile anglaise, nous sommes indécis quant au choix à faire. En effet, l’une comme l’autre sont de vraies sportives. Il est inutile de vouloir les comparer à ce qui se fait aujourd’hui. Il faut tenter de revenir quelques décennies en arrière afin de mesurer l’avancée technologique de ces deux autos.
Un choix impossible
À sa sortie, la XK120 n’a que peu de concurrentes. Elle est également plus abordable que les autres sportives des années 50. Une décennie plus tard, nous nous retrouvons plus ou moins dans la même situation. La E-Type est une bombe lors de sa présentation au Salon de Genève en 1961. Alors, que choisir entre une sportive de 1950 et une de 1960 ? Nous reconnaissons volontiers que la XK120 DHC, avec ses tambours et sa direction lourde et imprécise, peut vous donner des sueurs froides dans la circulation actuelle. La E-Type OTS possède quatre disques et une direction un peu plus légère. Le confort est d’époque. La bagagerie est limitée. Toutefois, même avec leurs défauts, ces deux voitures offrent des sensations de conduite impossibles à trouver avec les sportives d’aujourd’hui. Elles valent la peine que l’on s’intéresse à elles. Bémol tout de même pour certains modèles dont le prix est un peu exagéré.
Notre recommandation
Si vous désirez en savoir davantage sur la Jaguar E-Type, nous vous recommandons vivement la lecture du dernier livre consacré aux Jaguar Series I, II et III. Écrit par Malcolm McKay, Original Jaguar E-Type est un livre broché, très bien détaillé et illustré. Pour plus d’informations, reportez-vous à notre article de juin 2021 en cliquant sur le lien ci-après.
Les illustrations de cet article sont Copyright © de leurs ayants droit. Tous droits réservés ©2022 – Vintage Car Magazine.